*03 • La multiplicité de l’être

Au-delà du selfie

Voici la proposition d’une série photographique basée sur la lecture du Loup des Steppes (Hermann Hesse, 1927), récit qui souligne merveilleusement et avec beaucoup de talent littéraire la multiplicité de l’être vivant.

Selon Herman Hesse, nous n’avons pas en nous un loup solitaire et sauvage combattant sans cesse les conventions ou notre goût à évoluer en société, à être entouré. Nous ne sommes pas construit à partir d’une dualité tel que beaucoup d’entre nous aiment à se décrire (et ceci tant pas commodité, théâtralité, ou sensation avérée). Nous serions plutôt le résultat sain d’un millier de profils et d’archétypes qui se mesurent et se jaugent à l’approche de chaque parole et de chaque acte.

Prenons l’exemple d’une jeune femme élevée à la campagne et qui s’en serait allée à Paris. Quand ce personnage clairement ambivalent prend une décision, celle-ci ne représente pas la victoire de sa ruralité sur sa nouvelle mondanité (ou inversement). Cette jeune femme ne peut être réduite à une apparente binarité rendue maîtresse de ses actions. En plus de la campagnarde et de la parisienne, se bousculent tout un tas d’autres archétypes nés de son approche complexe du monde ne se résumant pas à « la campagne » et à « Paris ».

En somme, puisque qu’il faut un univers tout entier pour composer un individu, c’est se diminuer terriblement que de se croire le résultat de deux natures distinctes qui viendraient s’affronter ou se concilier à la façon du bourgeois face à l’animal sauvage, de l’artiste face au scientifique, de l’indépendant en société face au servile en amour, du propret et du bohémien, du citadin o du campagnard, le minutieux et l’explosif …

Et, ironiquement, le selfie, qui ne montre qu’une seule personne selon une seule position mentale (choisie), une fois mis en série, apparait un excellent moyen d’illustrer cette compréhension du livre de Hesse : la nécéssaire pluralité de l’être.

On partage généralement un selfie à la fois — même si cela est répété quotidiennement, le « spectateur » ne perçoit qu’une seule proposition de monstration de l’individu qui partage son selfie ou change sa photo de profil. Il paraît donc difficile de se rendre compte de la diversité d’état qui compose une même personne à la fois.

En effet, nous ne voyons qu’un être humain qui se montre. Aussi pourra-t-on considérer que les selfies montrent tous le même geste arrogant et égocentrique chez un million d’humains différents. Cent selfie d’une même personne sur Instagram, cent fois elle-même… oui, et non si l’on suppose que ce sont là cent parties variées d’elle-même.

Mais que se passe-t-il si l’on met bout à bout ces autoportraits, ces différentes « meilleures » versions de soi-même et qu’on les compare ?

Cette série 👇 propose donc ceci : comment des (auto)portraits, une fois réunis, illustrent finalement la centaine d’univers qui composent un seul individu.

Comparez …

Contraires …

Similarités. Même place, même personne, poses similaires, mais toujours deux soi-même

Selon Hesse, même l’animal, ici le loup, ne peut -être réduit à sa simple animalité du fait de la nécessaire multiplicité et pluralité de sa construction psychique et mental qui le compose, bien qu’il ne soit pas humain. La pluralité de l’être concerne toute chose vivante.

Enfin, et pour conclure cette approche, sans doute doit-on souligner l’idée que si nous sommes tous le résultat d’un univers tout entier, alors nous sommes le résultat non pas de composantes spécifiques — les mêmes nous construisent tous — mais des degrés différents de ces composantes en nous. Puisque nous sommes égaux en composantes et seul leur intensité nous différencie, alors nous sommes capables d’empathie envers quelqu’un vivant une situation qui nous paraît étrangère mais qui fait résonner en nous des « cordes » bien familières ; selon un même ordre d’idée, il parait insensé de nous différencier les uns des autres selon le goûts, l’âge ou le genre puisque là n’est pas le coeur de ce qui nous définit.

Commentaire :

CD (via Behance&FaceBook) : « Ce sont 100 parties variées certes, mais 100 parties étudiées, appréciées par le sujet et parfois, voire souvent retouchées, donc peu spontanées. En cela, je ne suis pas certaine que cela reflète une personne en 1 selfie comme en 100, mais la multiplicité peut-être, mais alors une multiplicité choisie. Par exemple, sur cette photo je ne te « reconnais », ni toi dans ton entier, ni toi dans ta complexité  »

LD : Un selfie est toujours étudié. On montre différentes parties « jouées ».. le sujet prend pour base le selfie donc omet d’un coup la spontanéité. Il pourrait être poursuivi avec des photos de famille par exemple, pour être plus proche de l’essence de la personne. Aucune photo ne peut montrer une personne dans son entier c’est justement l’idée.. prétendre montrer toute une personne en une photo c’est impossible (il me semble) et ici je sur-joue le fait qu’une photo montre une seule chose à la fois, comme quand on sourit sur un selfie.

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LD / Museum Tales

Publié par Museum Tales

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