“Sueño de mi muerte” à Amsterdam, Musée d’art urbain, (« Rêve de ma Mort ») par l’artiste Cix Mugre.
L’artiste Antonio Triana devient « Cix Mugre » lorsqu’il se munit d’un pinceau, de sa machine à tatouer ou d’une bombe aérosol ! De son art qui ressemble à un génial trip après consommation d’ayahuasca, il habille aujourd’hui les murs de son Mexique natal et du monde entier !
Le voici en long et en large.
Graffeur précoce, Cix commença à peindre les murs de Mexico à l’âge de 14 ans. Nous sommes alors en pleines années 1990 et ce que fait notre jeune monsieur est tout à fait illégal. Il est aujourd’hui appelé par la France, l’Autriche ou encore l’Égypte ou le Portugal afin d’exercer son art en toute reconnaissance !

En passe d’être connu dans le monde entier, sa popularité est déjà bien assurée dans le réseau international des street-artistes.
S’il est aussi tatoueur, artiste peintre et remarquable graphiste, c’est dans la peinture murale (la réalisation de « murs » ) que Cix se démarqua et continue d’exceller.
Antonio a grandi au sein d’une famille d’artisans aux fortes racines latino-américaines oaxacas et vécut un long moment à San Antonio Tecómitl (quartier périphérique de la Ville de Mexico) où se parle majoritairement le nahuatl, un idiome ancien, descendant des langues aztèques. Aussi son père est-il chinantèque et sa mère est originaire des populations zapotèques oaxacas, encore fort présentes au Mexique et, eux aussi, liés aux Aztèques.
Fier représentant de ces peuples autochtones et de leurs croyances polythéistes, épiques et éloquentes, Cix y puise quasi systématiquement. Autant dire qu’il n’a pas besoin d’avoir recours à l’ayahuasca pour donner vie à son univers psychédélique.

Et son style justement, comment le définir ? Doit-on vraiment le définir ? Il est souvent décrit tel le fondateur de l’« Art préhispanique pop psychédélique » (« Prehispánico Pop Psicodélico »), mais nous sommes bien d’accord : ça veut difficilement dire quelque chose…
D’autant qu’attribuer une étiquette à ce que fait Cix est prématuré ; seuls les historiens de demain pourront le rentrer dans une petite case spécifique.
Antonio, lui, donne un autre nom à son style : « le mien »

Bon, nous pouvons toutefois tenter d’en dire un peu plus sur « le sien », ou décrire un peu ce qu’on entend par « Prehispánico Pop Psicodélico » :
Comme dit précédemment les compositions de Cix baignent dans la tradition religieuse dite préhispanique (antérieure à la colonisation européenne) dont il en extrait des figures telles que le dieu phare Quetzalcóatl, la divinité Pakal ou l’énigmatique personnage Chac-Mool).

Plus qu’une citation, ces divinités sont souvent le personnage central de la pièce. Vêtues à la manière préhispanique et munies de leurs attributs propres (boucles d’oreille ostentatoires, épis de maïs, pectoral de serpent, plumes de perroquet), elles sont combinées à des formes futuristes et à une palette acidulées, plus communément qualifiées de « pop ».
Néanmoins, ces personnages gardent leur aspect bizarre et simple venu directement des témoignages artistiques qu’il nous reste, visibles dans les musées ou ruines archéologiques qui peuplent le Mexique, et que les Européens prirent à tort pour des formes naïves et simplistes, mais qui est en réalité une abstraction poétique renvoyant au monde spirituel des dieux ; il serait vain de vouloir associer à ces créatures mystiques des formes humaines ou tenter de les dessiner fidèlement.

Antonio affirme qu’il lui suffisait de parcourir visuellement les rues, personnes et lieux qui existent à Oaxaca (région mexicaine) pour explorer l’univers potentiel des couleurs qui se trouvaient face à lui.
Les couleurs franches et fraîches fusent et grâce à cette force pop, Cix séduit toute sorte de publics très divers, allant des très jeunes aux plus vieux d’entre nous, car nous sommes tous aisément happés par l’harmonie des couleurs vives et nous prenons aux jeux de décryptage des dizaines d’éléments se côtoyant.
Les thèmes dans lesquels puise Cix sont notamment les croyances mystiques et traditionnelles, les sciences futuristes, la mort, les effets du temps, les cycles de la vie… tout en jouant selon les codes de l’art urbain qui, s’il est très divers, se démarque souvent par son dynamisme, ses couleurs vives et des formes souples qui s’éloignent de la rigidité des lignes classiques. Monstres, pin-up’s, petits personnages évoquant les Comics ou les dessins animés : l’art urbain c’est la pop culture, le moderne, le jeune.

D’ailleurs, l’iconographie de Cix Mugre est également peuplée du folklore mexicain moderne ! Le Mexique d’hier rencontre celui d’aujourd’hui et puisque l’on aperçoit une galaxie par ci, un petit robot au coin d’un mur, un bras mécanique au pied d’un autre, alors on sent que ces « deux Mexiques » tendent ensemble la main à celui de l’avenir.
La popularité de l’artiste et de son art « divertissant » a largement dépassé les frontières mexicaines et le cadre du mur, puisque les marques Nike, Pepsi ou encore Doritos sollicitèrent sa collaboration !

Son œuvre vouée à être éphémère est aujourd’hui recouverte par une autre. © Art and Daily Fix
Cix est vu tel le représentant du muralisme mexicain contemporain, mais bien en dehors de l’art urbain ou street-art, la valorisation de son univers entre modernité occidentale et racines aztèques sert la représentation au premier plan de l’art contemporain mexicain ou latino-américain.
Aussi les mondes dans lesquels il puise sont ceux de minorités négligées par l’Occident. Notons à l’occasion que l’Amérique n’est pas seulement les États-Unis, mais aussi et surtout, tout le reste du continent ! Ainsi, appeler « Américain » un blanc d’Idaho d’origine polonaise ou allemande, a moins de sens que justement qualifier Cix Mugre d’artiste américain.

Son art est donc porteur des voix de ces « minorités » américaines légèrement bafouées au profit des conceptions du nord du continent.
Sans s’en rendre forcément compte, non seulement Cix préserve les racines mexicaines dans le temps en les adaptant aux formes visuelles appréciées des regards actuels, mais il les fait également voyager en France, au Guatemala, au Salvador, au Pérou, en Colombie, au Brésil, en Angleterre, en Égypte, en Belgique, en Allemagne, en Hollande, aux États-Unis, au Portugal, en Autriche…
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Sources :
Un avis sur « Cix Mugre : le Street-Art ce n’est pas que Banksy ! »